Notre Besoin De Consolation Est Impossible À Rassasier
(Stig Dagerman)
Si vous ne connaissez pas le texte de cet écrivain suédois, précipitez vous pour vous le procurer. C'est une réflexion qui a les oripeaux d'un poème en prose, d'une succinte autobiographie et d'un testament à la fois. Difficile de définir les sentiments éprouvés lors de la lecture de ces aveux d'une sincérité bouleversante. Il s'agit ici pour l'auteur d'exprimer une incapacité à vivre, une douleur permanente qui vient de sa conscience aigüe de la condition humaine et de ses limites, de ses écueils. Etre trop conscient, c'est être malade a écrit Dostoievski.
Qu'est-ce qui pourrait bien nous consoler de cette condition humaine ? Tellement de choses, de l'amour à la religion en passant par l'Art etc. Mais comment les accepter lorsque le voile du réel se déchire et que l'amère lucidité vous révèle leur vraie nature et les failles que comportent chacune de ces consolations ? Il y a une beauté âpre, une vérité contondante dans l'écriture et le contenu de ce texte sur lequel plane l'ombre de la dépression qui a tant tourmenté l'auteur.
On referme le livre et on est brusquement triste pour l'auteur, pour soi, pour les autres, pour notre aventure collective d'êtres humains, parce qu'on sait que même si on rira plus tard dans la journée, si on oubliera tout ça, il suffira juste de quelques instants de solitude, d'affreuse honnêteté, loin de l'agitation de nos existences modernes, pour nous rendre compte de notre définitive incomplétude, de ce manque sans nom qui nous fait accepter de reconnaître, de dire avec l'auteur, en espérant une meilleure tolérance à ces mots brûlants, que notre besoin de consolation est impossible à rassasier.
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